Quand Guns N’ Roses débarque sur le Sunset Strip au milieu des années 80, ce ne sont pas encore des rockstars. Juste un groupe fauché, dangereux, qui enchaîne les clubs et les galères. Slash, lui, rêve d’une Les Paul qui crache le feu… mais Gibson n’est clairement plus à son âge d’or. Et une vraie Burst de 1959 ? Totalement hors budget.
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C’est dans ce contexte qu’une guitare va atterrir entre ses mains. Une guitare artisanale, avec un logo Gibson sur la tête, fabriquée par un luthier discret de Los Angeles. Une guitare qui va littéralement définir le son d’un des albums les plus importants du rock. Le twist ? Ce n’était même pas une Gibson.
L’histoire de la Derrig : la “fausse Burst” devenue culte
Pour comprendre cette guitare, il faut connaître Kris Derrig, luthier californien dont la spécialité était de fabriquer des répliques extrêmement fidèles aux Les Paul de 1958–1960. Pas juste des copies : des instruments plus proches de l’esprit des Bursts originales que ce que Gibson produisait alors.
Pendant l’enregistrement d’Appetite for Destruction en 1986–87 Slash met la main sur l’une de ces répliques. Il l’essaie, accroche instantanément, et l’utilise pour enregistrer presque tout l’album.

Le tragique dans l’histoire, c’est que Kris Derrig décède en 1987, peu après avoir terminé ces guitares. Sa production étant limitée, ses répliques deviennent des pièces quasiment mythiques et l’une d’elles, celle de Slash, entre dans la légende.
Pourquoi la Derrig sonnait aussi bien ?
Une vraie “1959” dans l’esprit, pas dans la marque
Derrig travaillait comme un artisan à la façon des ouvriers Gibson de l’époque :
- Acajou léger
- Table érable flammée sélectionnée
- Manche profil ’59 épais mais confortable
- Vernis fin et respirant
Résultat : une guitare ultra résonante, vivante, qui réagit au moindre coup de médiator.
Les micros Alnico II : la clé du grain Slash
Au cœur du son : les Seymour Duncan Alnico II Pro. Niveau de sortie modéré, chaleur dans les médiums, aigus doux, sustain naturel.
C’est ce qui donne :
- le mordant sans agressivité de Sweet Child O’ Mine,
- le grain serré de Nightrain,
- le sustain chantant de Paradise City.
Une lutherie plus fidèle que Gibson (à l’époque)
Gibson, fin 80, n’était pas en grande forme. Les R9 modernes n’existaient pas encore. Les copies haut de gamme comme Derrig ou Max Baranet étaient souvent plus proches des vraies Bursts vintage que les Gibson du moment.
Et Slash, sans le savoir, a juste mis la main sur l’une des meilleures.
Derrig vs Max Baranet : démêler la légende
Beaucoup de fans mélangent les deux. Pourtant, Slash a bien utilisé deux répliques différentes.
La Derrig (celle de l’album)
- Utilisée en studio sur Appetite for Destruction
- Apparence : burst assez clair, table flammée
- Le son emblématique : dynamique, boisé, riche en médiums
- Slash l’utilise aussi sur certaines dates live avant 1988
La “Max” (Hunter Burst)
- Fabriquée par Max Baranet, autre maître de la réplique
- Arrive juste après la Derrig
- Surtout utilisée sur scène au début
- Table parfois moins flammée, grain sonore un peu différent
Les deux guitares sont devenues mythiques, mais c’est bien la Derrig qui a gravé Appetite dans l’histoire.
Ce que la Derrig apporte réellement au son Appetite
La magie vient du trio : guitare réactive + micros dynamiques + Marshall poussé.
Le rôle des micros Alnico II
- Pas trop de gain → le son respire
- Beaucoup de caractère dans le médium
- Harmoniques faciles à sortir
- Compression naturelle idéale pour le legato de Slash
La dynamique avec un Marshall modifié
Slash a utilisé un Marshall 1959T modifié par Tim Caswell, proche dans l’esprit d’un JCM800 boosté. Avec la Derrig, l’attaque se transforme immédiatement en ce grain serré mais clair typique d’Appetite.

Le style de jeu : le chaînon final
Tu peux mettre la Derrig dans les mains de n’importe qui, ça ne sonnera jamais exactement Slash. Le sien, c’est :
- un vibrato large et chantant,
- des glissés hyper fluides,
- une attaque franche qui met en valeur la dynamique des Alnico II.
Bref, la guitare fait beaucoup, mais le mec derrière aussi.
La non-officielle qui a sauvé la Les Paul
C’est sans doute la partie la plus ironique de l’histoire.
En 1987, Slash sort un des albums les plus vendus de tous les temps avec… une copie. Et c’est ce son-là, pas une Gibson officielle, qui relance l’intérêt massif pour les Les Paul à la fin des années 80. Tout comme la Telecaster de Jimmy Page a relancé l’intérêt vers la Les Paul quelques décénnies plus tôt, c’est une fausse Gibson qui a une nouvelle fois relancé l’intérêt vers la Les Paul !
Gibson, voyant l’explosion de la popularité du guitariste, le contacte ensuite pour produire ses premières guitares signature. La marque doit donc une partie de son retour en grâce à une guitare qu’elle n’a jamais fabriquée.
Peut-on trouver une Derrig aujourd’hui ?
Réponse simple : non, ou presque pas.
- Kris Derrig produisait très peu d’instruments.
- Il est décédé en 1987.
- Les rares Derrig existantes sont soit introuvables, soit entre les mains de collectionneurs qui ne vendent jamais.
Mais on peut bien sûr trouver des instruments qui s’en rapprochent
Les alternatives crédibles à la Les Paul Kris Derrig
Gibson Les Paul Slash AFD

On adore
- C’est la plus proche de la Derrig
- Elle a été créée avec Slash lui-même
- Le look, le son, tout !
On regrette
- Bien qu’il reste raisonnable, le tarif est premium
La Gibson Les Paul Slash AFD est l’alternative la plus proche du “voicing” de la Derrig : corps acajou léger, table érable flammée et surtout un set de micros Alnico II calibré selon les préférences de Slash. Le grain est chaud, réactif, avec ce sustain chantant typique d’Appetite. C’est l’option la plus directe pour retrouver la dynamique et la couleur sonore de la Derrig, sans passer par un instrument de collection.
Epiphone 1959 Les Paul Standard (VOS)

On adore
- Elle a tout d’une Les Paul 59
- Le tarif en moins !
- La forme de la tête, forcément
On regrette
- Elle a le son d’une 59, pas de la guitare de Slash
L’Epiphone 1959 VOS propose une approche étonnamment crédible du concept “Les Paul 59” à un tarif raisonnable. Manche chunky façon ’59, accastillage de bonne qualité et lutherie sérieuse : c’est une base solide pour un son vintage à médiums riches. Couplée à de bons micros (Alnico II si possible), elle offre une excellente alternative “budget-friendly” pour retrouver le caractère boisé et la réponse dynamique de la Derrig.
Seymour Duncan APH-2S Slash Alnico II

On adore
- Pas besoin de racheter une guitare !
- C’est clairement LE son de Slash
On regrette
- Peut-être le tarif ? Dans les standards de Seymour Duncan
Si tu veux retrouver l’esprit de la Derrig sans changer de guitare, les APH-2S sont l’upgrade le plus efficace. C’est littéralement l’évolution moderne des micros utilisés sur la guitare de Slash à l’époque. Niveau de sortie modéré, médiums doux, attaques rondes et sustain naturel : ils transforment n’importe quelle Les Paul en machine à sortir le grain Appetite. Le meilleur point d’entrée pour capturer l’ADN sonore de la Derrig… sans exploser ton budget.
Vintage V100 AFD

On adore
- Le look et le confort
- Le tarif bien plus raisonnable
- La qualité de la lutherie
On regrette
- La forme pas 100% Les Paul
- Il faudra envisager un upgrade des micros
La Vintage V100 AFD est l’une des alternatives les plus surprenantes pour retrouver l’esprit de la Derrig sans se ruiner. Lutherie sérieuse, table érable flammée, manche confortable et un set de micros Wilkinson bien équilibrés : elle propose un grain chaud et chantant qui se rapproche du caractère Appetite. Avec un éventuel upgrade vers des Alnico II, elle devient une base redoutablement efficace pour approcher le feeling et la dynamique de la Kris Derrig à un prix très accessible.
Voilà donc quelques alternatives pour trouver le son Appetite le plu sproche possible. Mais une vraie Derrig ? Il faut oublier. Elle fait partie de ces instruments légendaires qu’on raconte plus qu’on ne croise.
Au final, Slash c’est la Les Paul ?
Une “fausse Gibson” devenue l’une des guitares les plus importantes du hard rock moderne, il fallait oser. La Derrig de Slash c’est la guitare qui a forgé le son d’Appetite for Destruction, relancé la mode des Les Paul, et propulsé Gibson dans une nouvelle ère, alors que la marque n’était même pas impliquée !

